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Point de vue : participer aux décisions pour un Rhin alpin vivant

17/03/2021 / alpMedia
Sur la partie de son parcours située aux confins du Liechtenstein, de l’Autriche et de la Suisse, le Rhin alpin est emprisonné dans un corset. Un projet commun signé par les trois pays il y a plus de dix ans prévoit de lui redonner plus de place. Jusqu’à aujourd’hui, rien n’a été fait. Les améliorations des eaux prévues dans la législation ne pourront être mises en œuvre que si elles bénéficient d’un large consensus, et si elles s’appuient sur une démarche participative permettant aux organisations environnementales de participer aux décisions, affirme Elias Kindle, directeur de CIPRA Liechtenstein.
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Elias Kindle, directeur de CIPRA Liechtenstein. © Caroline Begle, CIPRA International

L’élargissement du lit du Rhin alpin sur toute la longueur de son parcours est actuellement discuté. Au Liechtenstein, le projet est suivi par l’Office de la protection civile, qui va réhabiliter dans les 20 prochaines années les digues du Rhin limitrophes au pays. Le fleuve est actuellement emprisonné dans un corset de 95 mètres de large. Le projet de développement du Rhin alpin (EKA) adopté en 2005 prévoit de redonner vie au cours d’eau, en conciliant la protection contre les crues, la conservation des milieux naturels et les fonctions récréatives. Nous n’aurons une chance réelle de le réaliser que si les propriétaires fonciers, les agriculteur·trice·s, les représentant·e·s de la population et des communes, les organisations environnementales, les expert·e·s et les responsables des infrastructures s’assoient à la même table pour discuter du projet et participer aux décisions.

Les organisations environnementales du Liechtenstein entendent souvent cette phrase : « Vous avez été impliquées » (sous-entendu : de quoi vous plaignez-vous ?). En tant que délégation nationale de la CIPRA, la Société liechtensteinoise pour la protection de l’environnement (LGU) a effectivement été impliquée dans de nombreux projets : Projet de territoire Liechtenstein 2020, Stratégie de mobilité 2030, Stratégie énergétique 2030, Vision climatique 2050. Or, si l’on y regarde de plus près, on constate qu’il y a différents niveaux d’intensité dans la participation. Dans la phase de conception des projets, les ONG telles que la LGU sont informées. Il s’agit du niveau un de la participation, un niveau pré-participatif. Bien souvent, malheureusement, la démarche participative s’arrête là. Le niveau suivant, lui aussi pré-participatif, est celui de la consultation : on demande les avis du public concerné, représenté par les ONG. Ces avis sont donc entendus. Malheureusement, la prise en compte effective de ces avis par le destinataire est souvent encore trop peu transparente. La participation réelle se joue aux deux niveaux suivants, les niveaux 3 et 4 : concertation et participation aux décisions. La mise en place de processus véritablement participatifs est le seul moyen de s’assurer que les stratégies et projets soient portés par un large public, ce qui facilite en général leur mise en œuvre.

La réhabilitation des digues du Rhin et les améliorations écologiques imposées par la loi, à savoir l'élargissement du milieu aquatique, vont être réalisées dans les 20 prochaines années. Or, actuellement, l’implication des associations de défense de l’environnement dans ce projet générationnel laisse fortement à désirer. L’EKA a été signé il y a 16 ans par la Suisse, l’Autriche et le Liechtenstein. Dans le cadre de sa réalisation, nous n’avons pas dépassé jusqu’à présent le niveau 2 de la participation – un niveau pré-participatif.

En raison de la complexité des problèmes, la revitalisation du Rhin est un casse-tête qu’il va falloir résoudre. Les adversaires du projet craignent, entre autres, la disparition de terrains agricoles ou la prolifération des moustiques. Le projet est aussi compliqué par les différentes structures de propriété, ou par la présence d’infrastructures souterraines (captages,…) qui devront éventuellement être déplacées. Il est donc essentiel que le projet soit porté par une large partie de la population. Ce sujet a une énorme importance, non seulement du point de vue de la biodiversité, mais aussi pour la conduite future du projet par les autorités. Il nous appartient, à nous, ONG, d’être persévérantes, de communiquer avec insistance la complexité de ce projet générationnel auprès des administrations compétentes, et de gravir les prochains échelons de la participation, pour accéder à la concertation, ou, mieux encore, à la participation aux décisions.