Positions
Quelles politiques demain pour une Montagne à Vivre ?
L'avenir des montagnes, c'est maintenant !
Malgré les spécificités de la montagne, reconnues depuis 30 ans par la loi Montagne, et qui permettraient une grande diversification de l'offre, la montagne vit sur le modèle quasi-unique du tout-ski depuis 50 ans, les Alpes du Nord servant de phare à bon nombre d'autres massifs. Pour autant, le bilan de la politique de la montagne n'est pas négligeable : le dépeuplement a été presque enrayé (sauf en zones très rurales), le niveau de vie des régions de montagne s'est rapproché de la moyenne nationale, même si de fortes disparités existent entre les différents massifs, voire entre différentes parties d'un même massif. Très positif également sur cette période, le développement d'un réseau d'espaces protégés qui ont permis le maintien d'espaces et d'espèces sauvages patrimoniaux et emblématiques et la préservation d'espaces agricoles à forte valeur agronomique (AOC, etc).
Aujourd'hui, les fortes évolutions qui marquent nos territoires changent toutefois la donne :
- Les conséquences du réchauffement climatique deviennent préoccupantes (disparitions de glaciers, menaces sur la ressource en eau, éboulements en haute montagne, enneigement réduit, érosion de la biodiversité montagnarde...).
- La pression sur la ressource en eau s’accroît au point de compromettre les équilibres hydrologiques, tant sur le plan qualitatif que quantitatif, avec notamment la menace d’un suréquipement hydro-électrique sur les têtes de bassins.
- La pollution gagne les vallées et devient alarmante.
- Les fonds de vallée et les piémonts autour des agglomérations subissent un mitage et une fragmentation de l’espace préoccupante sous la pression de l’urbanisation.
- Le modèle économique du « tout-ski » a permis de faire vivre des vallées. Mais après avoir capté 90% des investissements touristiques et provoqué d'importants impacts, parfois irréversibles sur la nature montagnarde, il semble stagner, sans perspective d'avenir durable.
- L'agriculture de montagne se tourne vers un nouvel avenir notamment autour des productions locales et des circuits courts.
- Aujourd'hui nos sociétés sont à 80% citadines. Malgré des appréhensions liées à ce milieu si peu familier, trois quarts des Européens, et en particulier les jeunes générations, se déclarent clairement attirés par la nature montagnarde et par les expériences que les hommes peuvent y vivre. On retrouve aussi cet attrait dans le solde migratoire positif de la population vers les zones de montagne alpine.
- Dans ces territoires rudes et historiquement considérés comme défavorisés, de plus en plus d'habitants tentent de vivre avec passion, créativité et détermination, parfois en cherchant hors des modèles classiques de la société de consommation.
C'est à la lumière de ces évolutions qu'il convient de travailler à l'acte II de la loi Montagne et au pôle d’excellence « tourisme de montagne » récemment mis en chantier.
Nos montagnes sont des joyaux inestimables pour la société humaine
Juste lever les yeux pour regarder là-haut cette formidable beauté...
Il s'agit là de territoires d'exception où l'être humain peut vivre des expériences singulières, faites de beauté, de relations marquantes avec la nature, de rencontres directes avec la grandeur et la fragilité de cette Terre qui nous héberge, de sensations simples mais Ô combien fortes : être un humain, parfois petit bon homme, au coeur de cette imposante nature dans la tranquillité de la contemplation ou l'engagement de soi dans des activités sportives de montagne.
Cette recherche d'une harmonie homme/nature porte en elle un profond respect et une indispensable préservation de nos richesses naturelles, c'est un facteur d'équilibre essentiel, pour chacun de nous, pour notre civilisation.
N'est-ce pas aussi cela qui stimule de plus en plus d'habitants à vivre de la montagne en inventant, façonnant une vie qui convient à leurs aspirations ?
De forts enjeux culturels et économiques
Dans des territoires aussi exceptionnels, il y a des enjeux particuliers qui nécessitent plus d'imagination, de créativité, d'engagement collectif et de volonté politique. L'exemple du tourisme est marquant : 90% des investissements vont au tourisme « hors sol », pour l'essentiel les grosses stations, qui transforment la haute altitude en zones urbanisées, presque « comme en bas » : la montagne n'est plus qu'un décor, un objet de consommation. Seulement 10% des investissements vont à la saison estivale, alors qu'elle représente 50% du chiffre d'affaires du tourisme et permet des activités très diversifiées dans la quasi-totalité des vallées, souvent au plus près des acteurs et de leurs vraies vies en montagne. Ils vivent individuellement leur milieu avec passion et peuvent être, en travaillant ensemble, une force créative, imaginative pour mieux parler de la montagne, la porter, la partager dans toutes ses dimensions et ainsi permettre l'accès de tous à ses formidables richesses naturelles et culturelles.
Il y a là un véritable défi, environnemental, économique et politique pour aller ainsi mieux à la rencontre de la société qui a besoin de ce lien fort, de ces expériences de vie en pleine nature. Une conception du tourisme véritablement ancrée dans les territoires de montagne peut avoir un bel avenir. Il passera par une forte volonté politique d'encourager l'investissement, non dans les canons à neige ou autres équipements lourds, mais dans l’engagement humain pour vivre, partager et préserver nos montagnes.
Auteurs
Mountain Wilderness, Fédération française des Clubs alpins et de montagne, France Nature Environnement, Comité français de l'Union internationale pour la conservation de la nature, CIPRA France, Coordination Montagne, Ligue de Protection des Oiseaux, Pôle Alpin d’étude et de recherche pour la prévention des Risques Naturels, WWF
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Position Inter-associative - Loi de montagne |